À propos des cancers SMARCB1

Des cancers différents,
un même gène défectueux :
le SMARCB1

Les tumeurs SMARCB1-déficientes sont rares et agressives et touchent principalement les enfants et les jeunes adultes. Elles peuvent apparaître à différents âges dans différents endroits du corps, sont connues sous des noms différents, et se manifestent par des pathologies et des symptômes variés, mais elles partagent toutes la même mutation, celle du gène SMARCB1. En général, ces tumeurs ne présentent pas d'autre mutation récurrente, contrairement à la plupart des autres cancers, qui se caractérisent par des mutations génétiques multiples.

Le gène SMARCB1 joue un rôle essentiel dans la division cellulaire et la suppression des tumeurs. Comme tous nos gènes, SMARCB1 est présent dans chaque cellule de notre corps. Il fait partie d'un ensemble de gènes nommé « complexe de remodelage de la chromatine SWI/SNF » dont les mécanismes épigénétiques régulent la transcription et l'activité d’autres gènes dans la cellule. Le bon fonctionnement de SMARCB1 est crucial pour déterminer quels gènes sont exprimés - « on » ou « off » - dans chaque cellule, ce qui confère à nos cellules leurs identités respectives. Lorsque le gène SMARCB1 d'une cellule est lui-même inactivé ou disparaît complètement, la cellule peut devenir maligne et de nouvelles cellules exprimant la même anomalie prolifèrent et deviennent des tumeurs.


Nous ne comprenons pas encore parfaitement par quel mécanisme la perte du gène SMARCB1 entraîne la prolifération tumorale, mais nous savons que c'est l'événement déclencheur d'un certain nombre de cancers et le seul moteur de certains cancers pédiatriques et du jeune adulte — le plus connu étant la tumeur rhabdoïde maligne, qui touche les nourrissons et les jeunes enfants. 


Qui plus est, 20 % de tous les cancers — pédiatriques ou adultes, — présentent des mutations au sein du complexe SWI/SNF à un stade ou à un autre de leur développement.


Les cancers SMARCB1 n'ont pas de traitement efficace. La chirurgie intensive, la chimiothérapie et la radiothérapie ne sont bénéfiques qu’à une minorité de patients, avec souvent de graves séquelles. 

Écoutez les experts

Olivier Delattre & Franck BourdeautInstitut Curie (France)
Charles RobertsSt. Jude Children's Research Hospital (États-Unis)

Quelques cancers SMARCB1

Il y a 25 ans, l'importance de la mutation du gène SMARCB1 dans le cancer a été découverte pour la première fois dans le contexte des tumeurs rhabdoïdes malignes (MRT). Depuis, on a découvert que cette mutation était à l'origine de beaucoup d’autres cancers rares, dont la liste s'allonge d'année en année :

  • Tumeur rhabdoïde du rein et tissus mous

  • AT/RT du système nerveux central (homologue cérébrale du tumeur rhabdoïde)

  • Tumeur desmoplastique myxoide du système nerveux central

  • Tumeur cribriforme neuro-épithélial du système nerveux central

  • Carcinome sino-nasal SMARCB1-déficient (SDSC)

  • Sarcome épithélioïde

  • Carcinome médullaire du rein (RMC)

  • Chordome peu différencié

  • Carcinome myoépithélial des tissus mous

  • Tumeur maligne des gaines des nerfs périphériques (MPNST) type épithélioïde

  • Schwannomatose

  • Méningiome

  • Chrondrosarcome myxoïde extraskelettique

  • Carcinome de la thyroïde SMARCB1-deficient

SMARCB1 & son intérêt pour la recherche sur le cancer en général

Depuis une dizaine d'années, la recherche sur le cancer est passée d'une classification anatomique (basée sur l’organe atteint) à une compréhension moléculaire et génétique plus transversale. Elle a également mis en évidence l'importance des mécanismes épigénétiques dans la formation des tumeurs. Les mécanismes épigénétiques régulent le développement et le maintien de l'expression génétique dans les cellules sans en modifier la séquence dans l’ADN. Lorsque ces mécanismes se dérèglent, des tumeurs peuvent se former.


Les cancers SMARCB1 offrent un aperçu unique de ces mécanismes épigénétiques et constituent une sorte de "paradigme pur" pour la recherche sur le cancer. En effet, contrairement à la plupart des cancers qui présentent de multiples mutations, à la fois génétiques et épigénétiques, les cancers SMARCB1 ne présentent qu'une seule mutation épigénétique : l’inactivation du gène SMARCB1. 


Comprendre comment cette mutation du gène SMARCB1 peut, à elle seule, déclencher le cancer nous apprendra beaucoup sur la plasticité des cellules cancéreuses (comment elles se transforment d'un type de cellule à un autre, comment elles provoquent l’évolution des tumeurs et leur résistance aux médicaments) et ouvrira potentiellement la voie à une nouvelle génération de thérapies ciblées et d'immunothérapies pertinentes pour beaucoup d’autres cancers.

D’autres experts en parlent

Michael FrühwaldUniversity Children's Hospital Augsburg (Allemagne)
Mrinal GounderMemorial Sloan Kettering Cancer Center (États-Unis)
William Foulkes McGill University (Canada)
Susan ChiDana-Farber Cancer Institute, Harvard Medical School (États-Unis)
Joshua WaterfallInstitut Curie (France)
Nada JabadoMcGill University (Canada)
Sam BehjatiWellcome Sanger Institute (Royaume-Uni)
Sophie Postel-VinayGustave Roussy (France)